études de cas

1 juin 2010
Associação In Loco : Développement local et promotion de la citoyenneté
Nelson Dias et Maria Priscila Soares

RENSEIGNEMENTS/IDENTIFICATION

1. Auteur de la fiche
Maria Priscila Soares
priscila.soares@in-loco.pt
Portable - 00 351 933 251 496
Responsable de projets à l’Association In Loco, dont elle a été un des co-fondateurs en 1988
Date de cette fiche - 01/06/2010

2. Identification de l’expérience
Associação In Loco
(Cofondatrice d’ANIMAR, l’association-réseau portugaise pour la promotion du développement local)
Avenida da Liberdade, 101
8150-101 São Brás de Alportel
Portugal
Téléphone : 00 351 289 840 860 Fax : 00 351 280 840 879
geral@in-loco.pt
www.in-loco.pt

3. Localisation
Arrière pays de l’Algarve, la région la plus au sud du Portugal

4. Domaines d’activité

X Agriculture, alimentation
X Artisanat, entreprises
X Services d’appui aux populations (information et animation)
X Accompagnement et ingénierie de projets
X Entretien des ressources naturelles et environnement
X Tourisme rural
X Promotion de la participation des citoyens (budget participatif)
X Formation professionnelle et éducation de personnes adultes
X Intervention sociale auprès d’enfants en risque et de leurs familles
X Réalisations d’études

DESCRIPTION

1. Objectifs initiaux

L’Associação In Loco a été créée en 1988, àfin de prolonger et approfondir une intervention lancée trois ans plus tôt, le Projet RADIAL (Réseau d’Appui au Développement Intégré de l’Algarve), à partir d’un établissement d’enseignement supérieur, IPF (Institut Polytechnique de Faro).
Étant donné que l’IPF était complètement voué à l’enseignement formel, l’association a été conçue en tant qu’espace d’action pour des personnes engagées dans la promotion du développement local dans le milieu rural très défavorisé de la zone montagneuse de l’arrière pays de l’Algarve (Serra do Caldeirão). Au même temps, étant dotée de personnalité juridique, l’association pouvait soumettre des candidatures àfin de financer les interventions à mener.
Objectifs initiaux : lancer et soutenir des processus d’animations pour le développement local, selon un modèle qui associait recherche-action, méthodologie de projet et approche communautaire.
Axes d’action initiaux :
(1) Animation des enfants et de leurs familles
Axe essentiel, étant donné que le premier financeur (de RADIAL et d’In Loco) fût la Fondation Hollandaise Bernard van Leer (_ 2) Formation professionnelle et appui à la création d’entreprises Au début, seulement des femmes ont profité des cours organisés
(3) Création et capacitation associative
Afin de doter les centres d’animation des enfants d’une gestion adéquate et de créer des noyaux de développement à niveau local

Début de l’intervention
Lancement du projet RADIAL – septembre 1985
Création de l’associação In Loco – août 1988

Besoins à l’origine de l’intervention
Le sous-développement, la pauvreté, le vieillissement da la population (en résultat de l’exode rural, aggravé à partir des années 60 du 20ième siècle en vertu de l’émigration de masse et de l’essor du tourisme sur la côte littorale) avaient voué les populations locales de l’arrière pays de l’Algarve (particulièrement dans sa partie orientale – Serra do Caldeirão) à la marginalisation et à la perte de confiance dans leurs ressources et dans leur identité culturelle.
Les interventions visaient l’animation des personnes et leur participation à des dynamiques de découverte et de mise en valeur des ressources locales, matérielles et immatérielles, celles du territoire, mais aussi bien celles représentées par chaque individu.

2. Modalités de réalisation

Il faut dire que dès son début l’association a été constituée par des personnes individuelles qui investissaient dans un projet commun en tant que professionnels et citoyens. In Loco n’a jamais intégré comme membres des personnes morales.

L’intervention a concerné des professeurs de l’Institut Polytechnique, et plus tard de l’Université, et aussi des personnes intégrées dans d’autres services publics régionaux (de l’agriculture, de l’aménagement, de l’économie, de l’emploi et de la formation professionnelle, de l’éducation des adultes …), moins en tant que cadres de ces services mais plutôt comme des professionnels disposant d’une expertise spécifique et engagés dans un projet citoyen.
Au début les actions ont été conduites en coopération avec les communes (municipalités et petites communes au niveau des paroisses) et les structures locales du service de l’Éducation des Adultes (pendant la période initiale du RADIAL).
Très rapidement In Loco a réussi à communiquer avec des réseaux à niveau européen : projets financés para la Fondation Bernard van Leer, Programme LEDA (CE), Centres de recherche et formation d’Universités associés à ce programme.

Le développement de projets plus larges, plus complexes et demandant des expertises techniques très variées a conduit à l’établissement de partenariats plus formels avec les Municipalités, les petites communes, presque tous les services régionaux, l’Université de l’Algarve (qui avait intégré l’IPF), des associations locales et même des institutions en dehors de la région.
À partir de 1992, In Loco a intégré le réseau du Programme LEADER, le Réseau Européen d’Économie Alternative et Solidaire, le réseau des Carrefours Ruraux, le réseau IRIS (autour d’initiatives de femmes en milieu rural) et, plus tard, avec le PIC EQUAL, des réseaux internationaux autour du thème de la participation citoyenne et particulièrement du Budget Participatif.

En termes de financement, In Loco a eu recours à plusieurs programmes de financement de la Commission Européenne (LEADER, NOW, EQUAL, Carrefour, Life, entre autres) et nationaux. Les acteurs locaux, spécialement les municipalités, ont assuré les contreparties exigées.

Ces derniers ans In Loco a investit dans la prestation de services (formation, évaluation de projets, réalisation d’études, création de parcours de randonnée, conception de modèles de budget participatif, organisation d’évènements).

3. Orientation actuelle

L’intervention a été élargie en termes territoriaux (couvrant à présent presque 2000 km2) et en termes de domaines d’action (appui et organisation des agriculteurs, sylviculteurs et éleveurs ; valorisation et promotion des produits locaux (agroalimentaires et artisanat) ; appui à la création et gestion de micro, petites et moyennes entreprises ; conception et organisation de formation professionnelle ; validation des acquis et organisation d’activités d’éducation des adultes ; promotion du tourisme rural ; développement d’activités d’intégration d’enfants en situation de risque et de leurs familles ; réalisation d’études et autres projets sur les communautés d’immigrants dans la région ; etc.).
Cet immense travail multiforme demande une équipa étendue : aujourd’hui presque 40 personnes à temps plein.

Le travail d’animation pour le développement est de plus en plus réduit, faute de financement : les instruments programmatiques ne payent l’immatériel et les élus locaux ont de moins en moins de ressources financières (les moyens de communication informent qu’une municipalité sur dix au Portugal est en état de faillite) et la plupart d’entre eux ne comprennent pas encore la nécessité de ce type d’investissement.
Le travail social est en expansion mais le financement est très irrégulier et les programmes (à présent d’initiative nationale) sont trop inflexibles et conformistes.
À travers la multiplication des projets, In Loco essaye de conserver une approche intégrée, mais cet objectif devient de plus en plus lointain.
In Loco essaye aussi de multiplier les prestations de services et d’affirmer son expertise dans des domaines spécifiques : comme la formation, l’évaluation et de plus en plus les méthodologies de participation politique (par rapport à cette dernière dimension, l’association est consultante pour des mairies au Portugal, comme par exemple pour la Municipalité de Lisbonne, et aussi pour le gouvernement de Cap Vert).
Dans une telle situation, l’idée de territoire se perd ou se transforme énormément : aujourd’hui Serra do Caldeirão n’est plus la seule référence, ce n’est qu’un espace parmi d’autres. Parallèlement, l’idée de participation organique et d’approche communautaire tend à s’évanouir : les personnes participent dans tous les projets et activités organisés par l’association mais de plus en plus cantonnées dans les divers publiques-cible fixés par les programmes qui financent les interventions menées.

4. Bilan

Bien que l’association ait bâti une histoire d’intervention significative et qu’il y ait des fruits irréfutables de son travail, faisant partie de cette histoire depuis le début (1985) je ne peux pas m’empêcher de sentir une certaine déroute et impuissance. D’une part, la possibilité de financement européen est en train de se réduire. De l’autre, l’État nous invite – associations et militants de la promotion du développement local – à assumer des tâches qui incombaient à des services publics actuellement en processus de démolition. Nous sommes regardés comme des prolongements de l’appareil d’État, qu’il peut mal payer (en termes de montants et en termes de délais) et faire travailler dans des conditions de grande insécurité professionnelle.
En même temps nous avons créé un corps technique important et là-dessus nous faisons face à une situation contradictoire : l’expertise de divers éléments est pointue et en mesure de répondre aux besoins réels du terrain, mais il se peut que les programmes ne soient disposés à payer son exercice (les financeurs pratiquent une approche top-down qui impose les activités à développer). Pour rendre les choses plus difficiles, congédier les collaborateurs sans plus de financement pour leurs activités devient une affaire destructrice quand les lois de travail exigent à l’employeur de payer les prestations sociales dues que les programmes ne payent pas.
Il est évident que le temps est venu pour l’associação In Loco de diminuer le nombre de personnes engagées en tant que professionnels rémunérés, de créer un espace de travail bénévole élargi et de redéfinir son champ de action.

En termes de solidarité, je souligne un aspect latéral mais très important à mon avis.
Bien que rémunérés, la plupart des éléments d’In Loco ont investi leur vie et leur énergie dans le travail d’intervention. On le comprend mieux, sachant que les personnes qui travaillent dans l’association reconnaissent être profondément touchées par l’expérience et que celles qui s’en vont parlent de la tendance à se maintenir en contact avec l’organisation, à demander son appui et à recourir aux anciens collègues.
Je dirais que tout au long des années In Loco a été une école de citoyenneté pour ceux et celles qu’y travaillent, et que cet effet peut être aussi important que les résultats de l’intervention sur le territoire.

ANALYSES ET COMMENTAIRES (portée générale de l’initiative)

1. Quelle économie l’action a-t-elle ou peut-elle générer ? Les projets développés par In Loco, toute seule ou en partenariat, ont canalisé vers une région marginalisée des millions d’Euros, ayant comme résultats, entre autres : (1) l’installation ou la réhabilitation d’infrastructures sociales, culturelles et environnementales (musées, églises, places publiques, zones protégées…) ;(2) la création de micro et petites entreprises (de transformation agroalimentaire, de production artisanale, de tourisme rural, de restauration, de services) ; (3) la valorisation de produits locaux agroalimentaires (eau de vie d’arbouse, liqueurs, fromage de chèvre, miel, pain de caroube, confitures, gâteaux, plantes médicinales et aromatiques…) et d’artisanat (jouets et meubles en bois, tissage manuel, miniatures en joute, broderies, travail en pierre calcaire, bijouterie, patchwork...) ; (4) la légalisation des petites unités de production agroalimentaire artisanale ; (5) la dotation des associations locales et entreprises en ordinateurs ; (6) le lancement de foires et d’événements visant la promotion du territoire et la commercialisation des produits locaux ; (7)la capacitation de centaines de personnes (en termes de domaines techniques spécifiques, de TIC, de gestion, de compétences de base en communication…) ; (8) la mobilisation de larges dizaines de formateurs (éducateurs d’adultes, formateurs professionnels, professeurs de divers niveaux) ;(9)l’organisation de séminaires et conférences, de niveau national et international.

2. Comment l’action a t’elle augmenté la prise de pouvoir et la responsabilité dans les solutions mises en oeuvre ?

L’association a toujours adopté une méthodologie de projet qui cherche à transformer tous les éléments impliqués dans chaque processus en participants actifs, et à ce titre co-responsables de la conception, du développement et de l’évaluation des activités et des résultats. La terminologie officielle qui parle de bénéficiaires ou de destinataires n’est pas de mise.
Transformer tous les éléments en participants actifs ne signifie pourtant qu’ils soient tous au même niveau : la participation est un processus qui évolue selon trois dimensions : horizontale (élargissement du nombre des personnes/structures qui participent) ; verticale (complexification des tâches et des responsabilités des personnes/structures) ; intensive (degré d’engagement des personnes/structures).

La pratique de la participation a toujours été considérée comme un choix technique efficace en termes de mobilisation et de formation des personnes, comme un recours en termes de faire de chaque participant un agent de développement dans son milieu et comme un instrument de promotion de la citoyenneté.

3. Quelles articulations l’action a-t-elle utilisées ou produites pour réussir des percées ? Obstacles récurrents/effets des systèmes ?

Tout au long des années, l’association a essayé de exercer une action pédagogique auprès des pouvoirs politiques constitués, tant à niveau municipal qu’à niveau central. Les résultats sont minces.
Bien que certains maires aient fait un parcours d’apprentissage en termes de participation populaire ou d’animation pour le développement, les changements sont loin d’être spectaculaires.
Quant au pouvoir central, les résultats sont indiscernables. In Loco a pesé dans certaines décisions (par exemple, la valorisation de la composante d’animation territoriale au niveau de l’application nationale du Programme LEADER ou la production de législation relative à l’eau de vie d’arbouse) mais les décision prises ont toujours visé le moindre dénominateur commun.