études de cas

21 avril 2009
La Société anonyme GOLGEMMA (Esperaza, France) : Une entreprise engagée dans la démarche ISO 26 000

Entretien entre Patrick Collin, co-directeur, lors du passage de la délégation internationale « En route vers Lux’09 … »… le 21 avril 2009. Il rencontre Jacques Fiset, directeur du Centre Local de Développement de la Ville de Québec (Canada) à Castillou (Luc-sur-Aude).

1- Bref historique de la SA GOLGEMMA.

Patrick Collin s’installe en 1991 à Castillou, dans la commune de Luc sur Aude, en SARL.Sa société fusionne avec celle de Jean-Claude Pichot en 1997 pour fonder la SA GOLGEMMA ; elle produit et fait le négoce d’huiles essentielles, de belle qualité, majoritairement bio. Elle est l’une des dix entreprises présentes sur le marché européen. Elle est repérée, sans publicité, parce qu’elle est innovante par ses pratiques. La conduite de l’entreprise privilégie la responsabilité sociale et l’emploi local. Lorsque ses locaux brûlent en 2003, l’esprit d’équipe lui permet d’échapper à la liquidation.

Source : site du BASE Sud –Audois qui propose plus de 100 expériences locales dans le Sud de l’Aude : www.base-sud-audois.fr

Patrick Collin est engagé dans une démarche ISO 26000 de responsabilité sociétale et environnementale.

La norme va bientôt sortir car tous les Etats ou presque l’ont signée. C’est un processus d’autoévaluation, pas d’audit externe. C’est difficile pour une petite entreprise comme la sienne, car tous ses actes doivent être analysés, et toutes les parties prenantes avec qui il est en relation. Tout est concerté.Ça ne peut pas être marqué par un esprit post-colonial. Ce n’est pas une usine à gaz non plus, c’est un engagement sur une voie de progrès, ajustée au fur et à mesure.

2 - Sa méthode se base sur le voyage.

Pour acheter ses produits, il dort sur place pour discuter, il explore les circuits relationnels, économiques. Oui, il constate que les enfants travaillent… Et si on trouvait une solution ensemble ? Lutter contre la corruption ? C’est l’impact d’un projet réussi qui la fait reculer, car ça devient déshonorant… Il vend des produits qui sentent bon, dont il est fier. Son métier, ce sont les huiles essentielles, mais il vend aussi des conteneurs d’épices. Pourquoi ? Parce que c’est nécessaire s’il veut maintenir les producteurs sur leurs terres et garder ses approvisionnements. C’est donc beaucoup de démarchage autour du cœur de métier. Il achète en bio si possible, mais pas exclusivement, car cela peut avoir des impacts négatifs sur le choix des cultures et les pondérations entre les cultures pour les huiles (et la vente) et les cultures pour l’alimentation. Or, la survie des producteurs vient en premier.En voyageant, il apprend aussi la valeur du temps.

Il travaille avec des organismes de micro-crédits à Madagascar (650 familles). Et restitue 1% à la caisse pour aider à la construction. Il participe à un conseil d’aide au prêt, piloté par des référents locaux. Une prime est reversée, une fois le contrat réalisé, avec l’ouverture d’un compte en banque. C’est un vecteur puissant de socialisation.

Il faut introduire la réflexion économique sur la composition d’un prix, une comptabilité, un équilibre dépenses / recettes dans une vue d’ensemble. Il faut beaucoup discuter. Il faut aller au-devant, s’installer, palabrer, expliquer. Combien ça coûte ? ou pourquoi ça coûte ce prix là ? Car l’espoir existe que ça rapporte beaucoup, tout de suite. Il faut beaucoup de temps et d’exemples. Car c’est en faisant qu’on apprend.

Beaucoup d’ONG pensent mal leurs activités, parce qu’elles ne partent pas de la réalité. Elles manquent d’une réflexion appropriée aux petits créneaux. C’est cher parce que c’est rare. Planter beaucoup pour vendre, en injectant de l’argent à flot, c’est couper l’herbe sous le pied à ceux qui s’appliquent à bien faire depuis dix ans, et sont fidélisés. Oui ça peut rapporter à court terme, mais ça ne dure pas. C’est pire après. On voit les mêmes projets, rejaillir tous les 5 ans !

Ses locaux sont inadaptés. Il envisage de changer de lieu, mais pas de territoire, ce qui requiert des investissements. Pour s’agrandir, il encourage aussi l’agrandissement des cultures à proximité, pour garder un contrôle sur l’alambic. Dans le contexte de crise viticole, ce serait profitable aux agriculteurs et pourrait pousser à la formation des jeunes au bio pour les plantes aromatiques. Le lycée agricole pourrait devenir fournisseur des plants pour des BTS, avec des fiches techniques culturales.La Chambre d’agriculture se dit intéressée, mais on risque d’avoir fini de planter avant qu’ils aient pris le train ! C’est sans nouveauté ! Ce qui marche, c’est l’engagement local de 3 ou 4 paysans volontaires, à proximité, en plus de Jean-Claude Pons, ce qui permet une surveillance et donne de l’expérience.

Le système REACH est fait pour les gros, mais c’est nécessaire pour continuer. Dans le cadre de REACH GOLGEMMA doit se faire agréer comme marchand de matières premières à usage pharmaceutique. Car les pharmaciens sont soumis au contrôle sur le contenu des flacons. Lui-même ne vend pas de petits flacons, mais 52 tonnes pour usages pharmaceutiques (18 à 20 %), cosmétiques (60%), le reste vers l’alimentaire. Et le pharmaceutique garantit l’ouverture vers les deux autres filières.

Les entreprises sont vecteurs de progrès.
Quand Jean-Claude Pons est arrivé, avec un autre, ils ne gagnaient rien, avec les plantes aromatiques. Quand il arrive de Suisse, lui aussi veut associer la production avec le négoce en 1991. Aujourd’hui, il a un chiffre d’affaires de 5 millions € et créé 17 emplois dans la Haute Vallée de l’Aude. Son ambition est portée par de beaux produits. C’est plus de responsabilité, il doit donc bien gérer. Oui, il fait de la marge, mais pas n’importe comment. Il la doit aux connaissances qu’il a réunies sur les conditions de fonctionnement du marché. Ces connaissances le rendent capable de se situer, de façon juste, de tenir et durer dans le circuit.

4- Perspectives, voies de progrès

L’importance de l’évaluation pour conserver le dynamisme économique, sociale et environnementale. La norme REACH introduit une démarche qui renverse la charge de la preuve. Elle peut être une voie de progrès car l’industriel doit prouver l’innocuité de son produit, ce n’est plus aux pouvoirs publics de prouver la toxicité en cas de problème. Beaucoup d’ONG pensent mal leurs activités, parce qu’elles ne partent pas de la réalité Il faut introduire la réflexion économique sur la composition d’un prix, une comptabilité, un équilibre dépenses / recettes dans une vue d’ensemble.

Site internet : www.golgemma.com


REACH ?Sigle anglais pour Registration Evaluation and Authorisation of Chemicals
Enregistrement, Evaluation et Autorisation des substances chimiques.
Réglementation européenne qui fait appel au bon sens : avoir un minimum d’informations sur les substances chimiques avant de les lâcher dans la nature !

L’industrie chimique a introduit 100000 molécules sur le marché européen depuis les années 1950. Pour 86% des substances chimiques sur le marché, les informations relatives à leur toxicité sont insuffisantes voire inexistantes. Selon la Commission Européenne, seules 3% des substances chimiques qui circulent en Europe ont fait l’objet de tests toxicologiques. D’où la nécessité d’établir des règles...

Chronologie :
8 ans de débats entre les ministres de l’environnement, syndicats, ONG et l’industrie de la chimie, au cours desquels le texte initial a été très affaibli.
Adoption du texte final en Décembre 2006 et entrée en vigueur le 1er Juin 2007.
Toutefois ce texte constitue une première étape : une réglementation unique qui remplace près de 40 textes législatifs, le renversement de la charge de la preuve (l’industriel doit prouver l’innocuité de son produit, ce n’est plus aux pouvoirs publics de prouver la toxicité en cas de problème), et le consommateur peut demander au fabricant si un produit contient une des 1500 substances répertoriées comme « extrêmement préoccupantes ».
Evaluation des coûts et gains par la Commission européenne :
Coût pour l’industrie chimique : 2,3 milliards d’euros, soit 0,05% de son CA
Gain pour les finances publiques : 50 milliards d’euros d’économie sur 25 ans pour les dépenses de santé et idem pour les dépenses environnementales

Pour lire une analyse détaillée complète de la réglementation : http://www.greenpeace.org/raw/conte...