études de cas

Avril 2009
Trophées du tourisme responsable, France
Atelier 7 Lux’09
Alain Laurent

La RSE des acteurs du tourisme « responsable » : du « micro interne » au « macro externe », un exemple de croisement filière/territoire à bénéfice réciproque. A quelles conditions ?

Contribution à l’atelier n’°7 « Participation démocratique et ancrage territorial » de la 4ème rencontre du RIPESS (Réseau Intercontinental de la Promotion de l’Economie Sociale et Solidaire) dans le cadre du projet collectif des Pactes Locaux.
Alain laurent - TER_RES (BEIRA.CFP) & Pactes Locaux - ** 33 5 61 62 46 83 - courriel : territoiresresponsables@orange.fr

Le contexte : le 20 Septembre 2007 se tenait à Paris la remise des premiers Trophées du Tourisme Responsable, initiative pionnière de Voyages–sncf.com (VSC, première agence de voyages en ligne française). L’événement, organisé avec le soutien de routard.com, Mondial Assistance, Yahoo !, le Crédit Coopératif, le Comité 21 etc. était placé sous la présidence de Yann Arthus-Bertrand et sous les patronages du Ministère de l’Economie, des Finances et de l’Emploi et du Ministère français des Affaires étrangères et Européennes.
Pour cette première édition des Trophées, 150 candidatures avaient été déposées dans 8 catégories. Un à deux lauréats par catégorie ont été distingués.

La thématique : et en 2008 ? Les lauréats 2007 sont-ils, un an après, dans la logique d’innovation récompensée par leurs victoires ? VSC a confié au cabinet BEIRA.CFP, spécialisé dans l’articulation tourisme-développement durable et membre des Pactes Locaux, le soin de donner les premiers éléments de réponse à cette question. L’idée était d’inscrire les Trophées dans une démarche qualité en appréciant leur « traçabilité » tout en valorisant les efforts des lauréats.

La méthodologie : l’objectif était de répondre à deux questions : que sont devenus les Lauréats depuis 2007 ? et quelles sont les avancées réalisées ? Compte-tenu des délais et des moyens mobilisés, le bilan a débuté par un questionnaire général suivi de la constitution de dossiers décrivant a) les principales retombées depuis 2007 (= effets de toute nature), b) une avancée « significative » (en quoi est-elle particulièrement notable, intéressante, innovante etc. ?). Les informations fournies ont été traitées en interaction avec les lauréats pour établir une trame puis un texte agréé par les deux parties. Plus de 200 courriels ont été échangés, une visite terrain effectuée aux Orangeries de Lussac, un entretien direct (FTC) et des entretiens téléphoniques réalisés .

Les résultats : l’analyse des contenus a permis de constater que, mises bout à bout et dans un ordre logique, les « avancées » des acteurs du tourisme lauréats de VSC s’inscrivent dans une démarche de progrès continu dont les niveaux de concrétisation s’emboitent naturellement dans deux grands ensembles : l’un interne au sein des structures et dans le cadre des relations de proximité obligées (en haut et rouge sur le schéma) et l’autre, externe, au niveau des acteurs en général et territoriaux en particulier (en bas et en bleu). La condition sine qua non de cette démarche de progrès est l’existence d’une clientèle assurant la viabilité économique de la structure (pointillés rouges).

EXEMPLES DE MARGES DE PROGRÈS INTERNES

Mieux s’organiser, mieux gérer : consolidation du cœur de métier (Les Orangeries de Lussac), création de commissions thématiques (La Route des Sens), recrutement de responsables « Qualité », « Tourisme Responsable », « Suivi de chantiers », « Programmes d’activités », « Réalisation d’Etudes », « Gestion et achats éco-responsables » (Huttopia, Atalante), etc.
Renforcer ses compétences : formations aux métiers de base (restauration, accueil, gestion etc.), au développement durable (Cap France, FTC), aux « Eco-gestes », sensibilisation d’accompagnateurs et de collaborateurs (Atalante), distinctions (les Lauriers Ecorismo) et une académie (Académie Ecorismo) ! Etoffer, varier ses partenariats : avec voyages-sncf.com, des associations, des experts et bureaux d’études, des organisateurs de salons, l’ANPE, l’association Tourism For Development, la SEPAQ (Société des Etablissements de Plein Air du Québec) etc.
Augmenter son offre, la rendre plus qualitative : restaurant bio-écoresponsable (les Orangeries de Lussac), certification iso 14001 (Hôtels Palladiens, Cap France) et label Chouette Nature (Cap France), mise en valeur des ressources culturelles (Villages Créoles), cahiers des charges prestataires (environnement, social), aménagement de sites (Huttopia), etc.
Augmenter sa clientèle, la diversifier : clientèle plus motivée (Les Orangeries, Atalante etc.), comités d’entreprises (La Route des Sens), extensions géographiques au Québec, en Australie, à Madagascar etc.
Mobiliser d’autres acteurs : hôtellerie, campings, maisons d’hôtes, restaurants, collectivités, offices du tourisme, responsables d’achats ou développement durable, formateurs, institutionnels, élus, habitants et même enfants (les Petits Ecolos chez Nouvelles Frontières).

EXEMPLES DE MARGES DE PROGRÈS EXTERNES

Renforcer son poids, sa crédibilité, sa notoriété : importance des distinctions et trophées, de la participation aux salons, de la nécessité de sites internes ergonomiques et de qualité et des réponses à des sollicitations en accompagnement ou conseils. Soutenir le développement local : projets d’assainissement et de gestion des déchets, appuis à la logistique scolaire, création d’un centre culturel etc., et aussi maintien de salaires aux équipes, malgré l’arrêt des activités touristiques (Atalante).
Elargir sa vision et agir plus largement, à l’échelle des territoires : politique d’achats locaux écoresponsable, soutien aux activités de productions, sociales et culturelles dans le territoire, élaboration de « Fiches destinations », déclinaison d’identités villageoises au sein de programmes d’aménagement plus globaux etc. (Orangeries de Lussac, Villages Créoles, Atalante et La Route des Sens).

L’analyse : l’amélioration continue interne débute par une meilleure organisation de la structure (l’entreprise), de ses prestataires et une augmentation des compétences propres et externalisées (partenaires). Ce sont les ingrédients de base pour une offre de qualité qui assurera le volume de clientèle nécessaire. D’autres acteurs privés, institutionnels ou de la société civile s’impliquent et donnent une visibilité plus importante au projet économique. L’amélioration continue externe prend en compte les fournisseurs, les offreurs de services et les responsables des infrastructures économiques, sociales et administratives du territoire. L’entreprise devient et assume son rôle d’acteur socio-économique local, qui peut soutenir des projets de développement d’intérêt collectif et des démarches de plus grande échelle. Le territoire et ses responsables s’en trouvent légitimés, confortés, et le territoire devient un peu plus un acteur collectif à part entière.

Les questions à enjeux :

Les 5 réunions régionales organisées par les Pactes Locaux dans le cadre de la préparation de l’atelier n°7 ont bien mis en évidence que les acteurs de la nouvelle économie (grosso modo l’oeconomie de Pierre Calame, FPH) avaient une capacité à penser et exécuter des projets composites, intégrés, prenant en compte les différentes dimensions spatiales, temporelles et thématiques du développement des personnes, des groupes affinitaires et des territoires.

  • Les acteurs de la nouvelle économie accepteront-ils de « mettre les mains dans le cambouis » pour se décloisonner dans les faits et amener les acteurs sensibles de l’économie conventionnelle à progresser dans le bon sens ?
  • L’état, les institutions et les régulateurs accepteront-ils de soutenir des dispositifs d’accompagnement – juridiques, fiscaux, formatifs, d’animation - à la mesure des enjeux et des difficultés de ce rapprochement inévitable ?