études de cas
Tatalon est l’un des 39 barangays (communautés locales) du 4e district de Quezon City. Au total, Quezon City a quatre districts et a une population totale de 2,4 millions, soit la plus grande des 17 municipalités de la région métropolitaine de Manille (population totale de 11 millions).
La plupart de la population de Tatalon (environ 30,000) est soit pauvre ou extrêmement pauvre. En effet, Tatalon est l’une des communautés les plus pauvres de la région de Manille. La plupart des gens vivent dans des taudis et ne sont pas propriétaires du terrain. Beaucoup vivent dans des zones qui sont régulièrement inondées.
Origines
En 1989, un groupe de conducteurs de tricycle a décidé de s’organiser. Conscient de la nécessité de rompre avec le cycle de travailler juste pour survivre, un fonds d’épargne et de prêt a été introduit pour les membres, et il est devenu officiel en 1996. Les membres ont été encouragés à pratiquer les valeurs de l’épargne, la débrouillardise, la discipline et l’autosuffisance en utilisant le modèle de vie coopérative. Cela a conduit à un changement dans les attitudes des membres, qui leur a donné espoir, dignité et respect de soi. Progressivement, ils ont pu améliorer leurs conditions de vie.
Ils se sont progressivement rendus compte qu’ils avaient besoin d’étendre cette approche à d’autres membres de la communauté. Le 25 août 2005, inspiré par la technologie de microfinance au Bangladesh, les fonds d’épargne et de prêt sont devenus l’INNER CITY DEVELOPMENT COOPERATIVE soit ICDC (explication du terme : Développement coopératif pour quartiers défavorisés du centre-ville). Elle vise à reproduire les succès obtenus par le fonds d’épargne et de prêt en aidant les petites entreprises afin d’accroître leurs capacités de revenu, permettant aux familles d’améliorer leur qualité de vie et de les aider à régler eux-mêmes leurs problèmes en devenant une communauté productive et soucieuse des besoins des autres.
En plus de deux ans, la Coopérative a fait beaucoup progrès. Aujourd’hui, environ 2600 personnes (la plupart des femmes) bénéficient des activités de microfinance. Chaque individu a un compte d’épargne. Il s’agit d’une obligation avant d’obtenir un prêt. Certaines personnes ont seulement un compte d’épargne, car elles n’ont pas besoin de prêts, et elles savent que l’argent sera prêté à d’autres personnes de la communauté.
Activités actuelles La loi des coopératives des Philippines comporte des dispositions qui leur permettent d’être à fonctions multiples. Par exemple, l’ICDC opère principalement en épargne et en prêts, mais elle pourrait également s’impliquer, par exemple, dans le domaine du logement ou les services funéraires. Une autre disposition de la loi autorise l’ICDC d’avoir des comptes d’épargne. Cela distingue l’ICDC de nombreuses institutions de microfinance dans d’autres pays, puisque leur législation interdit les comptes d’épargne dans les institutions non-financières.
ICDC paie un taux d’intérêt annuel de 7% sur l’épargne, basé sur le solde mensuel le plus bas à la fin de l’année. Cette disposition encourage les participants à garder leur niveau d’épargne le plus stable possible.
La coopérative possède quatre (4) types de prêts. Les trois premiers sont des prêts de microfinance (pas de garanties nécessaires) :
Produit ESPOIR _1000 - 10000 Peso : payables en 41 jours à un taux d’intérêt de 2,5%
Produit AMOUR _2000 - 120000 Peso : payables en 85 jours à un taux d’intérêt de 6,5%
Produit CONFIANCE _4000 - 50000 Peso : payables en 23 semaines à 15% de taux d’intérêt
Note. Taux de change du Peso des Philippines : 1 Euro équivaut à 62 Pesos.
Un quatrième type de prêt, avec garanties, est appelé Prêt rapide pour des besoins tels que la réparation d’habitations, des situations d’urgence (comme un enterrement), d’éducation, etc. Ce type de prêt n’est pas une opération de microfinance. C’est comme un prêt bancaire ordinaire.
Habituellement, les membres commencent par le produit ESPOIR et montent l’échelle à d’autres cycles de prêt. Certains membres sont déjà dans leur sixième cycle de prêt. En octobre 2007, l’ICDC avait un portefeuille total de prêts de 8,5 M de pesos et le taux de remboursement est d’environ 97%.
Le total des économies des membres s’élève à 4 M de pesos. Pour encourager l’épargne, un membre doit avoir des économies qui s’élèvent à 40% du prêt. Cela limite le montant du prêt de microfinance, et en même temps, agit comme un filet de sécurité pour la coopérative. De nombreux membres ont presque autant d’épargne qu’ils ont de prêts.
Pour devenir membres à part entière, avec tous les droits de vote dans les réunions, ils ont besoin de posséder une part sociale d’une valeur de 1000 pesos. Tous les autres sont des membres associés. Avec chaque prêt, ils doivent mettre de côté un minimum de 50 pesos afin de pouvoir un jour posséder une part.
Les enfants sont également encouragés à épargner. Les Épargnants Rêveurs, les enfants de plus de 6 ans, ont besoin d’épargner un peso par jour. D’autres, dans les écoles peuvent économiser des montants différents. Étant donné que les enfants obtiennent leur allocation hebdomadaire le dimanche, les épargnes sont ramassées le lundi et le mardi !
La coopérative est bien plus que la microfinance et les prêts. Ils ont organisé les membres dans 77 centres. Chaque centre est composé d’un minimum de 15 membres et un maximum de 30. Chaque centre doit élire un ou des coordonnateurs et un secrétaire. Ces chefs d’équipe reçoivent une formation mensuelle en leadership et en gestion.
Impact
En un peu plus de deux ans, l’ICDC a constaté de nombreux impacts positifs dans la communauté. Les vies des personnes se sont modifiées sur des questions telles que : l’identité, le changement de comportement, l’augmentation du revenu, des sources régulières de revenus, une réduction de la vulnérabilité et l’acquisition du capital social.
Et, en même temps, la communauté se transforme de la manière suivante :
Cohésion sociale
La paix et l’ordre
Activités économiques
Valeurs qui changent
Amélioration de la gouvernance communautaire
Plans futurs
La coopérative souhaite pouvoir étendre ses opérations à l’avenir. Beaucoup d’autres personnes dans le barangay de Tatalon désirent se joindre à l’ICDC car ils ont besoin de prêts de microfinance. Puisque le total d’épargne n’est pas suffisant pour financer tous les prêts (environ 50%), la coopérative doit emprunter de l’argent. Parce que la coopérative doit verser un taux d’intérêt annuel de 13% sur l’argent qu’elle emprunte, cela nuit considérablement au développement des activités. L’ICDC essaie de trouver un prêt à taux réduit afin de développer plus de centres. Par exemple, s’ils avaient un prêt à taux réduit de 2 M de pesos, ils seraient en mesure d’accorder des prêts à 500 nouveaux membres (surtout des mères). Ils souhaitent que les organisations dans le secteur des finances solidaires, que ce soit aux Philippines ou dans d’autres pays vont répondre aux besoins.
Conclusion
L’Inner City Development Cooperative est unique aux Philippines. Leurs activités démontrent clairement comment une coopérative, en utilisant la microfinance comme un outil, peut aider les gens et la communauté à devenir autonomes. Le chemin de lutte pour vaincre la pauvreté sera long. Toutefois, les effets positifs déjà observés dans la communauté de Tatalon démontrent clairement que la communauté et ses membres sont plus positifs quant à leur avenir collectif, et que par des actions économiques et sociales au sein de la coopérative, l’espoir se transforme dans une amélioration de la vie quotidienne.
Auteur : Yvon Poirier
Bulletin international de développement durable #44, Ier Décembre 2007
Contact : Zeny De Jesus [zenydejesus2003@yahoo.com]